CSE et délit d'entrave : quelle est la réglementation ?

Temps de lecture : 7 minutes
Par : Andrea H.
Mis à jour le 27/03/2024

L'essentiel
  • Le délit d'entrave est une infraction pénale assurant la bonne marche du CSE.
  • L'employeur, son représentant, les élus du CSE et les salariés peuvent commettre un délit d'entrave.
  • La loi considère qu'il y a délit d'entrave en cas d'empêchement à la constitution et au fonctionnement régulier du CSE.

Dans le cadre de l'exercice de ses missions, le CSE dispose de plusieurs moyens et de nombreuses prérogatives. Ainsi, pour mener à bien ses missions, la loi met en place des règles telles que celles relatives au délit d'entrave. Qu'est-ce qui constitue réellement un délit d'entrave au CSE ? Qui peut en être responsable ? On vous dit tout !

Délit d'entrave entre élus : de quoi s'agit-il ?

La définition du délit d'entrave dans le cadre du CSE

Le délit d'entrave est une infraction pénale, relevant précisément du droit pénal du travail. Selon l'article L. 2317-1 du Code du travail, constitue un délit d'entrave le fait d'empêcher :

  • la constitution d'un CSE, d'un CSE d'établissement ou d'un CSE central. En effet, dans les entreprises atteignant 11 salariés pendant 12 mois consécutifs, l'employeur doit mettre en place le CSE. S'il ne le fait pas, il commet donc un délit d'entrave ;
  • la libre désignation des membres du CSE, du CSE d'établissement ou du CSE central ;
  • le fonctionnement régulier d'un CSE, d'un CSE d'établissement ou d'un CSE central.

En outre, constitue un délit d'entrave le fait d'obstruer l'exercice du droit syndical. C'est ce que prévoit l'article L. 2146-1 du Code du travail

En somme, le délit d'entrave représente toute action ou abstention qui obstrue la mise en place et le bon fonctionnement du CSE. Concernant les actions, elles caractérisent le fait pour l'auteur du délit d'entrave de poser des actes matériels positifs. Quant aux abstentions, il s'agit principalement d'actes négatifs, qui supposent un comportement passif de l'auteur de l'infraction. En tout état de cause, le délit d'entrave traduit le non-respect des règles définies par la réglementation en vigueur.

De plus, pour qu'il y ait délit, il faut une entrave intentionnelle. Cela suppose donc une faute volontaire de son auteur.

Qui peut commettre un délit d'entrave ?

En règle générale, c'est l'employeur qui commet le délit d'entrave. Par ailleurs, lorsque l'employeur est une personne morale, il est responsable du délit d'entrave causé par ses représentants dans le cadre de leur mandat. En revanche, si les représentants ont personnellement commis le délit, ils engagent leurs responsabilités personnelles. 

Par ailleurs, il est de jurisprudence constante que lorsqu'une personne reçoit de l'employeur une délégation de pouvoirs, la responsabilité du délit d'entrave qu'il commet lui incombe. Toutefois, l'employeur reste responsable des fautes commises dans le cadre de son pouvoir de direction. Il en est ainsi même lorsqu'il a délégué ses pouvoirs. 

En outre, un membre du CSE peut être l'auteur d'un délit d'entrave. Il en est ainsi lorsqu'il adopte un comportement de nature à entraver le fonctionnement du comité. À titre illustratif, commet un délit d'entrave le membre du bureau du CSE qui prend seul et applique une décision nécessitant une délibération. 

Par ailleurs, un salarié de l'entreprise qui empêche un fonctionnement correct du CSE commet également un délit d'entrave.

En réalité, en l'absence de précisions légales, toute personne qui empêche la mise en place, le fonctionnement du CSE, la désignation de ses membres ou l'exercice de leurs attributions se rend coupable d'un délit d'entrave. 

Délit d'entrave au CSE : sanctions et exemples

Les sanctions prévues par la loi

L'article L. 2317-1 du Code du travail donne les sanctions du délit d'entrave. D'après le premier alinéa de cet article, l'entrave apportée à la constitution du CSE ou à la désignation de ses membres est punie d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 7 500 €. L'alinéa 2 poursuit que le fait d'apporter une entrave au fonctionnement régulier du CSE est puni d'une amende de 7 500 €. 

En outre, selon l'article L. 2146-1 du Code du travail, l'entrave à l'exercice du droit syndical est puni d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 3 750 €.

Lorsque le délit d'entrave est commis par une personne morale, les peines sont multipliées par cinq. C'est ce qui ressort de l'article 131-38 du Code pénal.

En principe, pour engager une action sur le fondement du délit d'entrave, il faut justifier d'un préjudice personnel et direct.

Par ailleurs, la victime qui justifie son préjudice peut solliciter l'octroi de dommages et intérêts pour la réparation. Ainsi, dans les entreprises de 50 salariés et plus où le CSE dispose de la personnalité juridique, il peut engager une action civile pour la réparation de son préjudice du fait du délit d'entrave. Toutefois, les élus du CSE ou les délégués syndicaux agissant à titre personnel en raison d'un délit d'entrave au CSE ne justifient pas d'un préjudice personnel et direct. Ils ne peuvent donc pas obtenir réparation à ce titre. Le préjudice personnel et direct des élus pourra être caractérisé seulement si le délit d'entrave constitue une atteinte à leurs droits personnels en tant que membres du CSE. 

Quelques exemples de délit d'entrave

Le Code du travail pose des règles très générales quant à la qualification du délit d'entrave. À cet effet, c'est la jurisprudence qui détermine les cas précis dans lesquels un comportement constitue un délit d'entrave. 

Entrave à la constitution du CSE et à la désignation de ses membres

Dans ce cadre, constituent un délit d'entrave :

  • l'absence de convocation de l'ensemble des organisations syndicales représentatives dans l'entreprise pour la négociation du protocole d'accord préélectoral ;
  • l'organisation des élections des membres du CSE en vue du renouvellement de l'instance en dehors des délais légaux ;
  • l'obstruction de l'employeur au déroulement du scrutin et au vote libre des salariés lors des élections professionnelles ;
  • la modification unilatérale par l'employeur du nombre et de la composition des collèges électoraux en présence d'un protocole d'accord préélectoral.

Entrave au fonctionnement régulier du CSE

Le refus de l'employeur de verser la subvention de fonctionnement et la subvention pour les activités sociales et culturelles du CSE constitue un délit d'entrave. Ces deux subventions qui constituent les budgets du CSE dans les entreprises de 50 salariés et plus sont indispensables au bon fonctionnement du CSE.

De même, l'employeur qui empêche la réalisation des formations obligatoires des membres du CSE sans motif légitime commet un délit d'entrave. 

En outre, certains CSE sont qualifiés de grands CSE en raison de leurs ressources et de l'effectif de l'entreprise. À ce titre, la gestion comptable du CSE doit respecter des règles plus strictes, telles que l'établissement de comptes consolidés et certifiés par un commissaire aux comptes nommé par le CSE. Ainsi, l'absence de communication des comptes consolidés et du rapport des commissaires aux comptes au CSE est constitutif de délit d'entrave à son fonctionnement.

L'employeur qui ne respecte pas la procédure d'information-consultation du CSE commet également un délit d'entrave. Il en est de même lorsque l'employeur ne met pas à la disposition des membres du CSE, les informations nécessaires à l'exercice de leurs missions dans la BDESE.

De plus, commet un délit d'entrave, l'employeur qui refuse de rémunérer les heures de délégation des élus du CSE. Une modification de l'horaire collectif de travail des salariés sans consultation préalable du CSE constitue également un délit d'entrave.