Trêve hivernale 2024 : droits et obligations des locataires et propriétaires

Temps de lecture : 5 minutes
Par : A. Ouaknin
Mis à jour le 19/03/2024

L'essentiel
  • Malgré l'interdiction générale, certaines situations permettent l'expulsion pendant la trêve hivernale.
  • Le gouvernement peut prolonger la trêve hivernale ou prendre des mesures exceptionnelles en sortie de trêve.
  • Les distributeurs ont l'interdiction de couper le gaz et l'électricité pendant la trêve hivernale, des aides de l'État existent pour les contractants défaillants.

Le propriétaire d'un logement a l'impossibilité d'expulser son locataire du 1er novembre au 31 mars de chaque année. C'est la trêve hivernale. Cependant, dans certaines situations, l'expulsion est possible. 

Qu'est-ce que la trêve hivernale ? 

L'interdiction d'expulsion 

La trêve hivernale a lieu tous les ans du 1er novembre au 31 mars. Durant cette période, le propriétaire d'un logement a l'interdiction d'expulser son locataire. 

Le gouvernement français a mis en place cette restriction pour minimiser le nombre de personnes se retrouvant sans logement durant l'hiver. 

La loi 2014-366 dite Alur du 24 mars 2014 prévoit cette interdiction d'expulsion durant la trêve hivernale. 

Cependant, le propriétaire peut engager la procédure d’expulsion pendant la trêve hivernale, en saisissant le juge des contentieux de la protection. L'ordonnance du juge prévoira une date d'expulsion à partir du 1er avril. 

Il est possible que la décision du juge soit conditionnelle. C'est-à-dire qu'un huissier exécutera l'expulsion si le locataire ne régularise pas sa situation avant la date butoir prévue. 

Le propriétaire ne peut pas expulser lui-même le locataire. S'il le fait, il encourt une peine d'emprisonnement ainsi qu'une amende pouvant aller jusqu'à 30 000 euros. 

Les départements d'outre-mer sont contraints à un autre type de trêve, la trêve cyclonique. Cette période interdisant l'expulsion des locataires varie en fonction du département car ils ne sont pas tous soumis aux mêmes périodes de perturbations cycloniques. 

Une prolongation éventuelle

Le gouvernement peut décider de prolonger cette période ou de prévoir des mesures exceptionnelles en sortie de trêve. 

Par exemple, pendant la crise sanitaire, le gouvernement a prolongé la trêve hivernale du 30 mars au 1er juin. Le gouvernement a décidé d’indemniser les propriétaires souffrant des impayés de leurs locataires.  

Le propriétaire peut demander l’intervention d’un médiateur si les relations avec son locataire sont conflictuelles. Pour ce faire, une demande à la commission départementale de conciliation doit être adressée. La commission a pour rôle de trouver une solution amiable aux litiges entre propriétaires et locataires. 

Trêve hivernale : une expulsion est-elle possible ? 

Les droits des propriétaires pendant la trêve hivernale 

🏠 La solution de relogement 

Les locataires qui bénéficient d'un relogement adapté à leurs besoins familiaux peuvent se voir expulser de leur logement initial lors de la trêve hivernale. 

Cette condition est très précise, il faut que le logement trouvé soit équivalent à celui précédent. Autrement dit, que le nouveau logement ait le même nombre de pièces correspondant au nombre d'occupants. 

📑 L'arrêté de péril

Si l’immeuble fait l’objet d’un arrêté de péril, le propriétaire peut expulser son locataire. 

Selon l’article 511-19 du Code de la construction et de l’habitation, l’autorité compétente prend un arrêté de péril lorsqu’un immeuble est sujet à un danger imminent, manifeste ou constaté. 

Les exceptions à l'interdiction d'expulsion de la trêve hivernale

🏚️ La présence de squatteurs

Lorsqu'un squatteur occupe un lieu, il est possible de demander son évacuation.

Il faut que le squatteur soit entré illégalement dans le lieu, qu'il s'agisse d'un appartement, d'un garage ou même d'un terrain. Entrer illégalement peut signifier être entré après avoir forcé une serrure, à l'aide de manœuvres ou de menaces. 

Le propriétaire doit d'abord porter plainte, puis réaliser la demande d'évacuation. 

La trêve hivernale ne s'applique pas lorsque le squatteur occupe un logement, résidence principale ou secondaire. Le propriétaire pourra donc voir son logement vidé à tout moment de l'année. 

La trêve hivernale s'applique lorsque le squatteur se trouve dans un lieu non qualifié de "logement" (le "logement" étant le lieu propre à un usage d’habitation de façon durable).  Par conséquent, ce squatteur ne pourra pas être expulsé du 1er novembre au 31 mars.

Un locataire qui reste dans un logement après la fin de son bail n'est pas un squatteur, tout comme la personne qui est hébergée par le propriétaire et qui ne veut pas quitter les lieux. 

📄 Les ordonnances du juge aux affaires familiales 

Le juge aux affaires familiales peut ordonner l'expulsion d'un membre d'un couple dans le cadre d'une ordonnance de non-conciliation ou de protection. Cela peut donc avoir lieu lors d'une procédure de divorce ou dans un contexte de violences au sein d'un couple ou à l'encontre d'un enfant. 

Le juge n'a pas à respecter la trêve hivernale, ce qui signifie que l'expulsion du membre du couple peut avoir lieu à tout moment de l'année, sans restriction. 

Trêve hivernale : quid d'une coupure de gaz et d'électricité ? 

Les droits des locataires pendant la période de trêve hivernale 

La décret n°2008-780 du 13 août 2008 a interdit au distributeur les coupures de gaz et d'électricité au cours de la trêve hivernale. 

Le fournisseur ne peut pas couper le gaz ou l’électricité, même si le locataire ne paye pas ses factures. En revanche, le fournisseur peut baisser la puissance du compteur à 1kVA.

Lorsque le locataire est bénéficiaire du chèque énergie, le fournisseur ne peut pas baisser la puissance du compteur. 

Les aides des locataires en situation d’impayés 

Le locataire peut décider d’informer le médiateur national de l’énergie de ses difficultés à faire face à ses charges. Le médiateur va décider de mettre en place un échéancier. Le fournisseur ne pourra pas baisser la puissance du compteur. 

Le locataire qui bénéficie d’aides de l’État telles que l’APL, l’ALS ou l’ALF, pourra toujours bénéficier de ces aides même s’il ne paye pas son loyer. 

Face à ces difficultés, le locataire peut aussi faire une demande d’aide supplémentaire auprès des organismes sociaux.