Malfaçon : quels sont vos recours ?

Temps de lecture : 6 minutes
Par : J. Descamps
Mis à jour le 11/10/2023

L'essentiel
  • Les constructeurs sont responsables de leurs travaux. Ils garantissent le maître d'ouvrage pour toutes les malfaçons dont ils sont responsables.
  • Les constructeurs sont garants pendant 10 ans des travaux qu'ils ont fait.
  • Le maître d'ouvrage et les constructeurs doivent souscrire une assurance pour se prémunir contre ce type de dommage.
  • Vous pouvez agir en justice pour obtenir réparation du préjudice subi par une malfaçon.

Vous avez acheté un bien immobilier, ou le faites construire ? Pour effectuer les travaux, vous faites appel à des professionnels ? Quels sont vos recours si l'entrepreneur exécute mal sa prestation ? On vous explique tout sur la malfaçon.

Quelle est la définition juridique de la malfaçon ?

🏚  La malfaçon

Il y a malfaçon lorsque des travaux ont été mal exécutés et qu'il y a une imperfection ou des défauts dans la construction. 

En effet, si vous faites des travaux chez vous, vous allez certainement faire appel à des constructeurs professionnels. Ils sont, à ce titre, responsables de toute malfaçon envers le maître d'ouvrage. 

👨🏻‍💼 Le maître d'ouvrage

Le maître d'ouvrage est celui qui fait appel au constructeur, et pour le compte duquel sont réalisés les travaux. Toutefois, si le défaut de construction provient d'une cause étrangère, le constructeur peut être exonéré de sa responsabilité. 

👷🏼‍♂️ Le constructeur professionnel

A ce titre, l'article 1792-1 du code civil précise que le constructeur est :

"1° Tout architecte, entrepreneur, technicien ou autre personne liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage ;

Toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire ;

Toute personne qui, bien qu'agissant en qualité de mandataire du propriétaire de l'ouvrage, accomplit une mission assimilable à celle d'un locateur d'ouvrage". 

Dans ce cadre, notez qu'un contrat de louage est celui qui lie le maître d'ouvrage et la personne qui réalise les travaux. En outre, les constructeurs sont responsables de leurs sous-traitants. 

         💡 Bon à savoir : d'une part, les constructeurs ont l'obligation de souscrire une assurance responsabilité civile décennale à l'ouverture d'un chantier (article L 241-1 du code des assurances). D'autre part, la personne faisant réaliser les travaux de construction (propriétaire de l'ouvrage, vendeur ou mandataire du propriétaire de l'ouvrage) doit souscrire une assurance dommages-ouvrage (article L 242-2 du code des assurances). 

La garantie décennale en cas de malfaçon (10 ans)

🔎 Qu'est-ce que la garantie décennale en cas de malfaçon ? 

Les constructeurs sont tenus par une garantie décennale (10 ans). Elle vise l'obligation de réparation posée par les articles 1792 et suivants du code civil. En effet, ces textes prévoient une présomption de responsabilité sur la tête du constructeur pendant les 10 années qui suivent les travaux. 

Cette garantie les rend donc responsables de plein droit, envers le maître d'ouvrage, de tous les désordres qui affectent la solidité de l'ouvrage et le rendent inhabitable ou impropre à l'usage auquel il est destiné. Cela concerne également les désordres qui affectent des éléments d'équipement qui font indissociablement corps à l'ouvrage.  

👍🏼 Existe-t-il d'autres garanties ? 

Oui, les constructeurs sont tenus par deux autres garanties. 

  • La garantie de parfait achèvement 

Les constructeurs doivent garantir les désordres ou malfaçons qui apparaissent dans l'année qui suit les travaux (article 1792-6 du code civil). Néanmoins, la garantie de parfait achèvement ne s'étend pas aux travaux engagés pour remédier aux effets de l'usure normale ou de l'usage de l'ouvrage. 

Vous devez mettre en œuvre cette garantie dans un délai d'un an après réception des travaux.

  • La garantie biennale (2 ans) ou de bon fonctionnement 

Avec la garantie biennale, les constructeurs doivent garantir les désordres qui affectent les équipements dissociables de l'ouvrage (plomberie, chaudière, interphone, moquette, climatiseur etc). 

Toutefois, il peut arriver que le dommage subi par le maître d'ouvrage ne soit pas couvert par les garanties ci-dessus énumérées. Dans ce cas, vous pourrez engager sa responsabilité sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun. 

L'action en responsabilité devant les tribunaux

✉️ La mise en demeure préalable 

Avant toute action en justice, notez que vous devez d'abord mettre en demeure l'entreprise de réaliser des travaux de réparation. S'il ne s'exécute pas, vous pouvez engager une action en responsabilité à son encontre.

🏛 Qu'est-ce qu'une action en responsabilité ? 

Si vous constatez une malfaçon dans les travaux réalisés par l'entreprise que vous avez mandatée, vous pouvez agir en justice. Il s'agit d'une action en responsabilité du constructeur qui peut être mise en oeuvre : 

  • avant réception des travaux en cas de malfaçon pré-décennales (c'est-à-dire apparue avant la réception)
  • après réception des travaux pour les désordres qui ne relèvent pas de la garantie décennale. 

Toutefois, avant d'engager une procédure devant les tribunaux, vous devez adresser au constructeur une mise en demeure. Dans le cas où le constructeur ne s'exécuterait pas, vous devrez l'assigner devant la juridiction civile compétente. 

🔎 Comment procéder ? 

Dans le cadre d'une action en responsabilité du constructeur, deux options s'offrent à vous. Soit vous assignez directement au fond devant la juridiction civile compétente. Soit vous engagez d'abord une action en référé, en parallèle d'une action au fond. 

  • L'action en référé

Dans un premier temps, vous pouvez recourir à une procédure en urgence dite de référé pour obtenir une mesure d'expertise ou le paiement de dommages et intérêts provisoires (l'on parle de provision). Ici, ce n'est pas une action au fond, donc le juge ne tranchera pas votre litige sur la question de la responsabilité. Ce type d'action n'est possible que dans un nombre limité de cas et sert généralement à obtenir une mesure d'expertise. 

Pour en savoir plus sur le juge du fond et le juge des référés, nous vous invitons à cliquer ici

  • L'action au fond 

Dans un second temps, vous devez assigner le constructeur devant la juridiction civile compétente. Pour ce faire, vous devez remettre une assignation au constructeur par l'intermédiaire d'un commissaire de justice (anciennement huissier de justice). Après examen de votre affaire, le juge du fond tranchera votre litige en se prononçant sur la responsabilité du constructeur. 

Comment faire constater une malfaçon ?

Généralement, vous constatez vous-même une malfaçon, parce que vous remarquez que les tuiles de votre toiture sont mal mises, ou que la plomberie est mal installée ou encore qu'un mur est mal isolé. Dans une telle situation, vous demandez à l'entreprise qui a réalisé les travaux de venir réparer ces désordres. Sauf qu'elle refuse et clame son innocence.

Alors, dans ce cas, il est opportun de solliciter l'intervention d'une tierce personne pour qu'elle vienne officiellement constater la malfaçon. 

Ainsi, vous pouvez faire intervenir un expert pour qu'il vienne constater les malfaçons. Vous pouvez le choisir ou demander à un juge qu'il ordonne lui-même une expertise judiciaire. 

Dans tous les cas, l'expert en question peut être un professionnel du bâtiment ou un commissaire de justice (anciennement huissier de justice).