Violation de domicile : comprendre ce délit et réagir

Temps de lecture : 6 minutes
Par : Antonin Y.
Mis à jour le 10/03/2023

Qu’entend-on par domicile ?

La violation de domicile est applicable seulement au domicile. Pour la jurisprudence le terme de domicile ne désigne pas seulement le lieu où une personne a son principal établissement.

Il s'agit également du lieu où, qu'elle y habite ou non, une personne a le « droit de se dire chez elle ». Peu importe la justification juridique de son occupation et l'affectation donnée aux locaux (Cass. crim. 22 janv. 1997, n° 95-81.186).

Pour les personnes physiques, il peut s'agir de :

  • un appartement,
  • une résidence secondaire,
  • une roulotte ou une caravane,
  • des dépendances,
  • une tente,
  • une chambre d'hôtel ou d’hopital.

Pour les personnes morales le domicile est :

  • le siège social,
  • les locaux professionnels,
  • des sites industriels et commerciaux,
  • un collège.

En revanche, n'est pas un domicile

  • une cellule de prison,
  • un immeuble détruit par un incendie,
  • une maison en construction,
  • une loge de spectacle.

Un domicile

Quand peut-on dire qu’il y a violation de domicile ?

1. Par un particulier

L'article 226-4 du Code pénal punit le fait, pour un particulier de s'introduire dans le domicile d'autrui à l'aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte, hors les cas où la loi le permet, ainsi que le fait de s'y maintenir après s'y être introduit d'une telle façon.

Élément matériel (faits concrets constitutifs de l’infraction)

La violation de domicile consiste à s'introduire dans le domicile d'autrui à l'aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte ou à se maintenir audit domicile après s'y être introduit de la sorte.

La jurisprudence interprète assez largement ces notions. Le juge doit d'abord constater qu'un procédé a été utilisé pour s'introduire dans le domicile contre le gré de la personne, sans qu'elle ait donné son accord :

  • utilisation d’un double de clé illicite
  • utilisation d'une fausse clef 
  • escalade de clôtures 
  • fracturation de porte
  • bris de vitres
  • fracturation de serrure ou de cadenas.

Élément intentionnel (psychologie de l’auteur de l’infraction)

La violation de domicile est un délit intentionnel. Cela signifie que l'auteur matériel des faits doit par ailleurs avoir la conscience et la volonté de réaliser une violation au domicile d'autrui contre son gré.

En pratique, les juges déduisent cette volonté du comportement de l’auteur. Si l’auteur fait preuve de violence pour s’introduire dans le domicile d’autrui, il a nécessairement l'intention de violer le domicile.

Par exemple, l'introduction avec violence dans le domicile d'autrui implique l'intention délictueuse des auteurs de telles violences (Cass. crim. 22 sept. 1930).

En défense, le prévenu peut invoquer l'erreur de droit prévue à l’article 122-3 du Code pénal (CA Versailles, 27 janv. 1995).  En revanche, les « cas prévus par la loi » justifiant la violation de domicile ne s'appliquent que très rarement aux particuliers.

Sanction

Le Code pénal punit la violation de domicile (introduction et/ou maintien) d'un an d'emprisonnement et 15 000 € d'amende. L'auteur d'une tentative encourt les mêmes peines.

Un domicile protégé

2. Par une personne publique

L’article 432-8 du Code pénal punit le fait pour une personne publique agissant dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ou de sa mission, de s'introduire ou de tenter de s'introduire dans le domicile d'autrui contre le gré de celui-ci hors les cas prévus par la loi.

Notion de personne publique

Il peut s’agir de :

  • une personne dépositaire de l'autorité publique qui dispose par ses fonctions d'un pouvoir de sanction et/ou de contrainte (juge, policier, gendarme…).
  • une personne chargée d'une mission de service public est une personne privée à laquelle a été confiée la gestion d'une politique publique (chauffeur de bus, agent de la SNCF…).

La personne publique doit avoir agi dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ou de sa mission. Il s’agit sinon d’une violation de domicile par un particulier.

Élément matériel

Ici aucun procédé d'introduction n'est exigé (comme c'est le cas pour un particulier). La seule qualité d'agent public suffit. L’absence de résistance de la victime ne suffit pas à justifier l’introduction. En la victime a pu céder par crainte de l'autorité, voire de représailles (Cass. crim. 27 juin 1909).

L'introduction au domicile peut être justifiée dans les cas prévus par la loi. Il peut s’agir par exemple de perquisitions par la police, de saisies ou expulsions par commissaire de justice. Le maintien au domicile n'est en revanche pas incriminé.

Élément intentionnel

La violation de domicile doit avoir lieu contre le gré de la personne dans le domicile de laquelle la personne publique s'introduit.

L'agent public doit donc avoir conscience et volonté de s'introduire au domicile malgré cette absence d'autorisation et sans y être autorisé par la loi.

Sanction

 La violation de domicile par une personne publique ou sa tentative est punie de deux ans d'emprisonnement et 30 000 € d'amende (soit le double des peines encourues par un particulier). L’article 432-17 du code pénal prévoit des peines complémentaires.

Comment porter plainte pour violation de domicile ?

Il est possible de porter plainte pour violation de domicile.

Il faut pour cela se rendre au commissariat de police ou à la gendarmerie. Les forces de l'ordre transmettent ensuite la plainte au procureur de la République. Pour éviter une attente trop longue au Commissariat ou à la Gendarmerie, il est possible de remplir une pré-plainte en ligne.

La victime peut aussi porter plainte auprès du procureur de la République. Pour cela il faut lui adresser un courrier recommandé. Le procureur compétent est celui du tribunal judiciaire du lieu de l’infraction ou du domicile de l’auteur de l’infraction.  

Par ailleurs toute atteinte à l'intimité ou à la vie privée, protégée par l'article 9 du code civil, donne droit à l'attribution par le juge d'une réparation financière.

Tribunal de Paris